Anja Fischer, orthophoniste, partage son expertise clinique sur l'utilisation de la vocalisation au-dessus du ballonnet (ACV) chez les patients trachéotomisés.
La vocalisation au-dessus du ballonnet (ACV) est une technique qui permet de rétablir le flux d'air dans les voies aériennes supérieures grâce à la diffusion d'un flux externe de gaz médical via le port sous-glottique de certaines canules de trachéotomie. Il est essentiel de comprendre l'importance d'une technique appropriée et de la bonne sélection des patients lors de l'utilisation de l'ACV pour garantir une application sûre et réussie de cette technique.
Anja Fischer est orthophoniste et travaille à Munich, en Allemagne, à la fois dans un hôpital neurologique et psychiatrique et en tant qu'indépendante. Elle a obtenu sa certification FEES en 2023 et poursuit actuellement des études à la FOM de Munich, avec un accent sur le marketing et les médias numériques. Anja est membre de la Sociéty for Dysphagia en Allemagne. Elle participe au groupe de travail sur la dysphagie à Munich, l’objectif est de s’engager dans des échanges professionnels, d’appronfondir ses connaissances sur les derniers développements dans le domaine de la gestion de la dysphagie et des canules de trachéotomie, et enfin d’échanger avec ses pairs et les spécialistes afin de promouvoir des approches innovantes en matière de soins. Pendant de nombreuses années, Anja s'est concentrée sur les soins aux patients porteurs d'une canule de trachéotomie, tant en milieu hospitalier qu'en milieu ambulatoire. Dans son poste actuel, elle utilise l'ACV presque tous les jours avec les patients. Nous nous sommes entretenus avec Anja pour en savoir plus sur l'ACV et sur les avantages qu'il procure aux patients.
La vocalisation au-dessus du ballonnet (ACV) désigne une technique qui peut permettre à un patient ayant subi une trachéotomie de parler même quand le ballonnet n'est pas dégonflé. Un flux d'air est insufflé par le port d'aspiration sous-glottique, sort au-dessus du ballonnet, puis remonte vers les cordes vocales. L'ACV permet une phonation limitée lorsque le patient est équipé d'une canule de trachéotomie à ballonnet à aspiration sous-glottique et facilite la communication pour les personnes sous ventilation mécanique.
J'utilise l'ACV avec des patients conscients et capables de coopérer. Ces patients ont une canule de trachéotomie à ballonnet qui ne peut pas être dégonflée pour des raisons de ventilation ou autres et n'ont donc aucune chance de communiquer verbalement. Je l'utilise également sous une forme réduite, avec un débit d'air moindre, pour améliorer la sensibilité du pharynx chez les patients qui ne sont pas conscient ou interactifs et qui ne peuvent tolérer un ballonnet dégonflé pour les mêmes raisons. J'ai trouvé l'ACV particulièrement bénéfique pour les patients atteints de démence.
Je trouve qu'elle ne convient pas aux patients qui sont très sensibles, qui ont tendance à se stresser facilement et qui ont un comportement physique défensif suite aux tentatives d'ACV. Il convient également de vérifier au préalable qu'il n'y a pas d'obstruction des voies aériennes supérieures et que l'aspiration sous-glottique fonctionne. Il convient également de garder à l'esprit que l'ACV ne doit pas se substituer au dégonflage du ballonnet, c'est-à-dire qu'elle doit être utilisée comme outil de soutien ou s'il n'y a pas de possibilité de dégonflage du ballonnet. En outre, elle ne doit pas être pratiquée sur des trachéotomies récentes.
La procédure générale pour l'ACV consiste à évaluer au préalable l'état actuel du patient et à en discuter avec le personnel infirmier et/ou les médecins si nécessaire. S'il n'y a pas de contre-indications, il est important d'expliquer au patient à l'avance (quel que soit son état) ce que vous faites et comment se déroulera la procédure. Les sécrétions situées au-dessus du ballonnet sont ensuite éliminées à l'aide d'une aspiration sous-glottique. L'adaptateur ACV est connecté à un port et à l'alimentation en air. Le patient est ensuite informé qu'un peu d'air passera au-dessus du ballonnet et qu'il pourra alors parler. Il est préférable de commencer par un très petit débit d'air, environ 1 litre/min, et d'augmenter jusqu'à un maximum de 5 litres/min si cela est indiqué et toléré. D'après mon expérience, il n'est généralement pas nécessaire d'augmenter le débit, qui est habituellement suffisant à 2-3 litres/min.
Jusqu'à présent, je n'ai connu que très rarement des complications et lorsque j'en ai connu, il s'agissait plutôt d'une sensation inhabituelle signalée par les patients ou d'une sensation de toux, qui disparaissait lorsque l'alimentation en oxygène était arrêtée ou le débit réduit. Parfois, les patients sont également désorientés lorsqu'ils entendent leur voix, car elle est différente de leur voix naturelle.
Je vois beaucoup d'avantages à l'ACV. Chez certains de nos patients, la sensibilité pharyngée s'améliore et les patients disposent d'un moyen de parler et de communiquer, ce qui est également important pour le personnel soignant, les médecins et les proches qui ont ainsi la possibilité de dialoguer avec le patient. En outre, je dirais qu'il s'agit d'un outil efficace pour les patients atteints de démence. J'ai également commencé récemment à l'utiliser avec des patients souffrant de dysphagie pour réduire l'aspiration et améliorer la déglutition grâce à la stimulation pharyngée.
Toutes les recommandations contenues dans ce support pédagogique constituent un guide général de bonnes pratiques, à mettre en œuvre par des professionnels de santé qualifiés, en fonction de leur jugement clinique et de la disponibilité des ressources en matière de soins de santé.
Les informations présentées ne doivent pas être considérées comme des conseils médicaux pour des conditions spécifiques. Les circonstances et les préférences individuelles d'un patient doivent toujours être prises en compte et la pratique clinique doit être conforme aux principes de protection, de participation et de partenariat.
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